Marie Palmyre Sarah Joyaux naît à Guéret dans la Creuse où son père est magistrat, mais celui-ci décède lorsque Sarah est à peine âgée de trois ans. Sa mère Rachel se remarie avec M. Davet, magistrat lui aussi, et un autre deuil frappe Sarah l’adolescente ; elle perd la demi-sœur Lucienne qu’elle chérissait tant. Entourée de gens de robe, la jeune fille rêve d’autre chose, dompte son lapin dans le jardin familial et s’exerce à la danse en cachette. On la dit complètement toquée comme son aïeule gitane espagnole, juive qui plus est, que son arrière-grand-père paternel, M. Veyre, aurait ramenée des guerres napoléoniennes. Placée en pension à Châteauroux, puis Orléans et finalement Auteuil, quatre mois avant sa majorité, elle prend sa liberté et invente sa vie parisienne.
Elle se forme à la danse classique puis hindoue, au culte des serpents, puis rencontre Martha-la-Corse qui fait d’elle une dompteuse de fauves. Déjà célèbre dans le tout-Paris où elle se produit notamment au Casino de Paris et apparaît pour danser les seins nus avec son serpent python dans les cages aux fauves, elle achète ses propres bêtes en 1925 après un bon contrat à l’Exposition des Arts décoratifs et se fait reconnaître par son domptage en pelotage avec un simple éventail en plume d’autruche. Elle débarque à Saint-Lactencin en 1928 avec sa ménagerie et en compagnie de son premier mari, le danseur et dompteur Gino Spini, ancien pilote de la Première Guerre mondiale. Victime d’un accident de voiture, celui-ci décède en 1932 et est enterré dans le cimetière de Saint-Lactencin. Sarah blessée et veuve met sur pied la célèbre opération de la pose de trois dents en or à son lion Prince en janvier 1933, présentée et filmée sur la scène de L’Apollo à Châteauroux.
Elle rencontre son second mari, l’écuyer de haute-école André Rancy, en 1937 et l’épouse en 1939 à Saint-Maur où elle possède La Tour de Gireugne. La carrière avec André lui procure trente de bonheur avec des tournées circassiennes dans plusieurs pays européens (Espagne, Hongrie…), celle de l’opéra-comique Les Saltimbanques sur les scènes des théatres municipaux, l’ouverture de cabarets dont celui de La Croix-Blanche à Châteauroux ou le Bar-Circus près du Cirque d’Hiver à Paris.
Elle transmets ses compétences à Jean Richard puis ne fait plus que des galas avec André ; celui-ci meurt en 1964 et Sarah se tourne à nouveau vers le Berry. Elle s’installe à Saint-Benoît-du-Sault, où elle veut animer le sud-est du département, organisant des expositions comme antiquaire et disant la bonne aventure. Elle renoue ainsi avec la terre de sa grand-mère maternelle, Marie Ratier, mais c’est dans la sépulture de sa grand-mère paternelle, Palmyre Joyaux, au cimetière Saint-Denis à Châteauroux qu’elle repose. Incomprise de sa famille mais jamais en rupture complète grâce à ses deux grands-mères, Sarah sans descendance tombe dans l’oubli avant d’être remise en lumière au Manoir des fauves de Saint-Lactencin par Isabelle Hannequart, une autre juriste.